Vidéaste à plein temps, on y est

Mes collègues ont su fêter mon départ dignement.

Retour d’expérience sur ce qui m’a mené à passer en vidéaste indépendant à plein temps : les envies, les opportunités, les risques calculés, les espoirs.

Attention : je ne fais que raconter ma vie dans cet article. C’est purement personnel, subjectif, et inintéressant si le sujet de l’entrepreneuriat vous indiffère. La question du passage d’une activité secondaire à une activité à plein temps revient souvent sur les groupes de discussion que je fréquente, c’est pourquoi j’écris ce petit état des lieux, afin de partager mon vécu.

Juin 2017 : première prestation

Je me lance professionnellement après pas mal d’années en amateur à faire des vidéos de voyage et des court-métrages (que je trouve maintenant irregardables tellement c’est nul). Je me mets sous le statut de micro-entreprise. Je n’ai alors aucun objectif particulier : je vais faire quelques prestations tout en gardant mon emploi salarié de développeur web. On verra où ça nous mène.

Mon premier client est une conférence de développeurs toute nouvelle qui a lieu à Barcelone. J’obtiens leurs contacts par l’intermédiaire d’un membre de mon cercle d’amis développeurs.

J’arrive principalement à gagner le contrat grâce à mon profil de développeur : je parle le même langage qu’eux, je comprends leurs problématiques, je suis force de proposition. Pour leur montrer que je sais filmer, je leur montre… mes vidéos de vacances.

L’expérience est concluante ! Je fais des erreurs, mais j’apprends du coup énormément, et surtout, mes clients sont très satisfaits. Rien de mieux pour me motiver et continuer à explorer ce domaine.

Dès le début de mon activité, je créée ce blog. Le pari est le suivant : je vais écrire du contenu de qualité assez souvent pour que cela me mette en bonne position sur les moteurs de recherche. On verra où ça nous mène.

Juillet/août 2017 : premiers mariages

Toujours dans l’optique de tester des trucs pour voir si ça me plait, je filme deux mariages durant l’été 2017. Et c’est plutôt positif : le mariage me semble être un excellent domaine pour débuter. C’est varié, il y a de la demande, et on peut facilement trouver des clients quand on débute.

Photo de groupe lors d'un mariage
Mariés dans un parc

Par contre je vois déjà venir les inconvénients de ce type de prestation : c’est extrêmement stressant et fatiguant. Et je ne cesserai par la suite d’admirer les vidéastes spécialisés dans le mariage : ils ne sont quasiment jamais perçus à leur vraie valeur, et ce qu’ils font est très compliqué.

De fin 2017 à fin 2018 : essor des mariages, marasme de l’institutionnel

Je booke 7 mariages pour l’été 2018. Pas mal pour un début ! Mais c’est aussi le signe que je ne suis pas encore assez cher, même si j’essuie beaucoup de refus de prospects qui ne comprennent pas que la vidéo a un prix.

Photo par Jérémy Savel

Par contre, en parallèle, c’est le vide total au niveau des clients professionnels : je reçois régulièrement des demandes de devis de petits commerces et start-ups pour des clips promos, pile ce que je veux faire. 100% de réponses négatives, principalement car je suis trop cher pour eux. Je me remets en question, je me rapproche d’amis qui sont déjà dans le milieu pour avoir leurs retours sur mes tarifs. Je me fais engueuler : mes prix sont trop bas. Le problème n’est pas là. Le problème, c’est que je suis surtout contacté par un type de clientèle qui n’a pas le budget pour la vidéo. Je pourrais dire qu’il s’agît juste d’une cible différente de mon positionnement, mais non : pour travailler au prix que souhaitent ces sociétés, il faudrait fonctionner à perte. Certains professionnels aussi sont incrédules face au budget que représente la vidéo. Reste à trouver ceux qui ne le sont pas.

Mars 2018 : je filme un gros salon au sein de toute une équipe. Je suis content de mes images. Pas de bol, le projet se perd du côté du client, et on ne nous demandera jamais de monter mes plans. Je n’ai donc toujours que la vidéo de la conférence tournée un an auparavant pour me vendre.

Durant la même période, je participe à un petit salon du mariage. En échange d’un stand, je leur fais un film d’une minute. Horrible expérience : il faut aller au contact des gens qui passent dans les allées en leur sautant dessus comme des proies apeurées, il faut se vendre de manière agressive. C’est totalement à l’opposée de ce que je suis et du service que je propose. Plus jamais de salon du mariage pour moi.

Pendant ce temps, je continue à booker des mariages, je reçois même des demandes pour l’année d’après, et j’ai peur de m’enfermer : je ne veux pas faire du mariage mon activité principale. La saison 2018 se passe pourtant bien : tous mes clients sont adorables, leurs unions se déroulent à merveille, et ils sont tous contents de leurs vidéos. Mais je finis l’été sur les rotules : en plus de mon emploi salarié et la naissance de notre (magnifique) petite fille, je dois passer des week-ends entiers à filmer, et les semaines qui suivent à monter les images. C’est éreintant.

Pendant quelques temps, la tentation de faire des prestations au rabais pour des professionnels est très grande : j’ai besoin de faire des images pour me vendre. Je n’ai rien à montrer. Mais je résiste : après tout, je ne suis pas pressé, j’ai un confortable job de développeur bien payé. Et puis je sais quel est mon problème : je n’ai tout simplement pas assez de temps pour construire ma marque, démarcher des clients, faire de la communication. Mon travail à plein temps m’empêche de lancer correctement mon activité vidéo. Je me lance sur plein de pistes, mais je n’ai jamais le temps d’aller au bout de mes démarches.

Septembre 2018 : premiers contrats pros

Sans que je ne change quoi que ce soit à ma communication et sans crier gare, je décroche en même temps 3 contrats auprès de clients professionnels : une conférence, un magasin, et une grande marque d’outillage. C’est la folie, et la motivation prend un coup de boost énorme.

Signe encourageant : un de ces clients m’a été apporté gràce à un mariage de l’été précédent. La personne décisionnaire a aimé la vidéo et s’est dit que ce serait bien d’avoir une trace de la reconstruction de son commerce. Moi qui avais peur de m’enfermer dans le mariage, je suis rassuré. Résultat :

J’enchaîne jusqu’à la fin de l’année. Bonus non négligeable : les projets sont passionnants, et mes contacts chez les clients sont d’une gentillesse infinie. Tout se passe à merveille. Et un de mes meilleurs souvenirs reste la publicité pour BLACK+DECKER sur laquelle on a eu carte blanche pour faire un truc fun :

Octobre 2018 : la décision

Cela fait quasiment 5 ans que je suis chez mon employeur. Pour un développeur, c’est beaucoup : on a tendance à beaucoup changer de boite, en général dès qu’on se lasse. Et puis j’ai reçu une proposition d’emploi en or, mais que j’ai du la refuser pour des raisons de calendrier. Je réfléchis donc à l’après. Se pose donc naturellement la question de passer à plein temps en vidéo. J’ai maintenant une bonne vision de ce qui m’attendrait dans ce domaine.

Pendant quelques semaines je me renseigne sur d’éventuelles opportunités pour un nouveau poste en tant que développeur. La vidéo c’est cool, ça donne envie, mais quand même, être payé assez confortablement à pisser des lignes de code toute la journée, c’est pas mal aussi. Conclusion de mes recherches : difficile de trouver une société qui propose du travail intéressant, qui a du sens. Faut dire que le métier de mon employeur actuel, c’est de vendre des livres numériques. C’est beau, comme vocation. Rien à voir avec les startups qui vont à fond dans l’uberisation qui schlingue. C’est donc décidé : je me mets d’accord avec mon employeur pour les quitter le 31 mai 2019, pile pour le début de la saison des mariages. Ainsi, pour mes premiers mois en tant que vidéaste indépendant, j’aurai du chiffre d’affaire garanti.

Début 2019 : hausse du rythme

Depuis que j’ai livré les vidéos de mes trois premiers clients, mon activité en vidéo corporate prend son envol, à un point où je n’arrive plus à suivre le rythme. Je suis obligé de temporiser voire de refuser certaines prestations. Non pas que je croule sous les demandes, mais je suis toujours salarié à plein temps : je suis toujours bridé par cette activité.

Presque 2 ans après le premier article sur le blog, je commence à voir les effets du référencement : je reçois de plus en plus d’appels de prospects ayant cherché un vidéaste sur Google. C’est très encourageant.

Je renforce peu à peu ma collaboration avec une boite de production avec laquelle j’ai sympathisé : on se refile du boulot mutuellement, et je collabore avec eux ainsi que d’autres vidéastes sur les gros projets qui nécessitent des équipes complètes. Pour les plus petits projets, j’interviens en artisan indépendant.

1er juin 2019 : plein temps effectif

Je me donne un an en micro entreprise pour monter en puissance et partir ensuite sur une forme juridique plus pérenne : monter une boite de production et/ou m’associer avec quelqu’un. Tout est possible. En attendant, mes objectifs sont les suivants :

  • développer ma clientèle sur les créneaux que j’ai identifiés sans avoir eu le temps de m’y mettre jusque là.
  • compléter mes revenus avec un peu de développement en freelance en cas de besoin.
  • retrouver une hygiène de vie à peu près saine en reprenant le sport. Le surmenage des derniers mois a fait de moi une épave pleine de graisse. Et pour filmer en continu tout une journée, il faut être en forme.
  • consacrer du temps à des projets persos sans garantie de rémunération immédiate mais avec du potentiel sur le long terme.

La suite de mon parcours sur cet article rédigé un an plus tard.

Entrepreneuriat

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